La loi du 10 septembre 2018 « pour une immigration maitrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie » a réformé les missions des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile financés par le service de l’asile du ministère de l’intérieur (CADA, HUDA, CAO, At-SA) pour « assurer une uniformisation progressive des conditions de prise en charge dans ces structures ».
Les cahiers des charges des hébergements d’urgence pour demandeurs d’asile (HUDA) et des CADA viennent d’être publiés. Un certain nombre de prestations disparaissent dans le cahier des charges sur les CADA (notamment sur la règlementation des établissements sociaux et médicaux sociaux) mais le ministère de l’intérieur devrait renvoyer à un « vadémécum », sans valeur réglementaire, qui sera prochainement publié et qui devrait reprendre ces éléments.
Face à la multiplication des lieux d’hébergement pour demandeur d’asile depuis 2015, le législateur a souhaité clarifier les missions de ces dispositifs en assurant des « normes minimales en matière d’accompagnement social et administratif », ceci dans l’objectif d’assurer une meilleure égalité entre les demandeurs d’asile pris en charge au sein de ces hébergements.
Le décret du 14 décembre 2018 a listé les différentes prestations des lieux d’accueil pour demandeurs d’asile qui devait s’appliquer depuis le 1er janvier 2019.
Ces prestations comprennent donc notamment la domiciliation, l’information sur la procédure d’asile et l’accompagnement dans les démarches administratives liées à l’asile, l’information sur les soins de santé, l’accompagnement dans les démarches d’ouverture des droits sociaux, pour la scolarisation des enfants ainsi que la préparation et l’organisation de la sortie du lieu d’hébergement.
Deux arrêtés concernant les CADA et les HUDA viennent donc d’être publiés pour préciser la mise en œuvre de ces prestations dans lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile.
Le cahier des charges des CADA remplace donc celui précédemment défini par l’arrêté du 29 octobre 2015. Jusque-là, les HUDA ne disposaient pas de documents cadre national précisant leurs missions.
1. Une uniformisation des cahiers des charges CADA et HUDA
Les deux cahiers des charges ont pour objectifs de clarifier les prestations assurées au sein des HUDA pour les calquer le plus possible sur celles qui sont proposées en CADA.
Ainsi, les HUDA et les CADA voient leurs missions sensiblement uniformisés.
Ces deux dispositifs doivent assurer :
- L’accueil, l’hébergement et la domiciliation des demandeurs d’asile ;
- L’accompagnement dans les démarches administratives et juridiques ;
- L’accompagnement sanitaire et social ;
- Le développement de partenariats avec les collectivités locales et le tissu associatif ;
- L’accompagnement à la sortie.
Les cahiers des charges viennent préciser certaines prestations :
- La prestation de restauration doit pouvoir être assurée par le gestionnaire si les locaux mis à disposition ne comportent pas de cuisine. Ces frais sont couverts par les ressources des demandeurs d’asile (qui devra supporter ces frais s’il perçoit l’allocation pour demandeur d’asile-ADA) ou, à défaut, par le fond de secours pour les demandeurs d’asile sans ressources.
- Des normes minimales assurées en matière d’intimité et de vie privée sont également prévues au sein des établissements. Ainsi un minimum de 7.5m² par personnes majeure isolée ou ménages en chambres partagées ou individuelles (obligation déjà prévue auparavant pour les CADA mais étendue aux HUDA).
- L’accompagnement juridique est reconnu comme faisant partie des missions des gestionnaires, notamment sur le droit au séjour des étrangers en France. En effet, la loi du 10 septembre 2018 prévoit que les demandes de titre de séjour à un autre titre que l’asile doivent être déposées dans un certain délai, défini par décret, non encore publié. Ceci implique que les demandeurs d’asile doivent être informés et les travailleurs sociaux formés à ce type de démarche au sein des lieux pour hébergement pour demandeurs d’asile. Cette mission d’accompagnement juridique est également reconnue en HUDA, sans préciser spécifiquement qu’il concerne l’accompagnement juridique à la procédure Dublin.
- Sur le volet santé, une visite est systématiquement organisée dans les HUDA et les CADA (auparavant, la visite médicale n’était proposée que dans les CADA). Elle peut être réalisée au sein de l’hébergement ou dans le cadre du parcours santé migrants tel que prévu par la circulaire du 8 juin 2018. La mission d’évaluation des vulnérabilités est rappelée dans les cahiers des charges pour les deux dispositifs.
- Les cahiers des chargent prévoient également des précisions quant aux missions de scolarisation des enfants.
- Le développement des partenariats avec les collectivités locales et le tissu associatif sont commun aux deux dispositifs mais moins dans un objectif de travail en réseau et d’articulation que d’orientation ou d’information sur les possibilités de bénéficier de prestations au niveau local.
- L’accompagnement à la sortie des dispositifs est prévu également au sein des CADA et HUDA. Cet accompagnement est limité concernant la formation professionnelle pour les BPI car elle ne sera proposée que si les personnes restent « sur le même territoire ». Les cahiers des charges précisent ce que recouvre l’accompagnement à la sortie mais aucune précision n’est apportée sur les décisions de fins de prises en charge dans les lieux d’hébergement, restant très problématique pour les gestionnaires d’hébergement au regard des difficultés d’interprétation de la nouvelle réglementation (voir ci-dessous).
L’actualisation des précédents modèles type de contrat de séjour et de règlement de fonctionnement ne sont pas publiés. Le ministère devrait renvoyer à un Vaddemeccum qui reprendrait les dispositions absentes du cahier des charges. Aucune information à ce jour sur la date de la publication des contrats- types. Les modèles précédents sont donc caducs.
2. Les spécificités des CADA
A travers la mise en place de ces cahiers des charges, les missions des CADA et HUDA se rapprochent. On note cependant certaines spécificités pour les CADA qui pourraient justifier un cout majoré par rapport aux HUDA (cout cible de 19.50€ par jour et par personne en CADA, contre un coût cible national de 16,25 € par jour et par personne pour les HUDA pour 2019 (sauf idf et création).
- Le taux d’encadrement : 1 ETP pour 15 demandeurs d’asile (DA) ou 1 ETP pour 10 DA « en fonction des caractéristiques et des publics accueillis ». La réforme de 2015 prévoyait un taux d’encadrement plus faible, allant jusqu’à un ETP pour 20 demandeur d’asile, ce qui n’est plus possible dans le nouvel arrêté. Ainsi, les taux d’encadrement plus important (1ETP pour 10 DA) pourraient se justifier pour la prise en charge de certains publics, notamment les femmes victimes de violences ou de traite des êtres humains qui vont se voir flécher des places spécifiques au sein du DNA.
- La participation des demandeurs d’asile au fonctionnement de l’établissement est uniquement prévue en CADA ;
- La prise en charge des frais de transports liés aux convocations OFPRA/CNDA ou préfecture ainsi que les frais liés à la scolarité des enfants hébergés (cantine, transports…), ces derniers devant être pris en charge qu’avec l’accord du préfet. Ces frais ne sont pris en charge qu’en CADA et ne sont pas mentionnés dans le cahier des charges concernant l’hébergement d’urgence.
- Une mission d’accompagnement plus précise et développée dans le cahier des charges CADA (aide à l’élaboration du récit, appui à la traduction, orientation pour aide juridictionnelle, aide au renouvellement de l’attestation de demande d’asile, mise en relation avec les professionnels de santé mentale et acteurs spécialisés sur la santé des enfants). Les missions des HUDA sont beaucoup moins développées, notamment sur le volet sanitaire ou ils n’ont qu’un simple objectif de « mise en relation » avec les services de soins compétents.
Ce qui disparait du précédent cahier des charges :
- Les dispositions liées à l’orientation par l’OFII et l’articulation avec le DNA.
- Le rappel des missions du CASF et les obligations liées au statut d’établissement social : autorisation, lien avec les schémas régionaux de l’accueil des demandeurs d’asile et de l’intégration (SRADA), rappel aux documents de contrats de séjour et règlement de fonctionnement ainsi que toutes les obligations tirées du statut d’ESMS (livret d’accueil, charte des droits et libertés, projet d’établissement, personne qualifiée…).
Les références aux qualifications et formations des intervenants sociaux. Le précédent cahier des charges mentionnait qu’au moins 50% des effectifs devaient être des intervenants socio-éducatifs et avoir reçus une formation relative à la procédure d’asile. Ceci est d’autant plus paradoxal que les missions des CADA incluent de façon plus précise un rôle d’accompagnement juridique.
La référence à la participation financière des personnes et à une possibilité de « caution ». On peut imaginer que ces dispositions seront intégrées dans les futurs contrats de séjours et règlement de fonctionnement (non encore actualisés).
La référence à la prolongation de maintien au sein du CADA en cas de demande d’aide au retour volontaire pour les déboutés de leur demande d’asile (alors qu’elles sont précisées pour les HUDA). Aucune référence à l’incidence d’une demande d’Aide au Retour Volontaire (ARV) sur la prolongation de l’hébergement, ce qui posera problème pour le calcul du délai à partir duquel la personne sera considérée en « présence indue ». Le cahier des charges HUDA fait référence à la possibilité de solliciter une ARV mais sans en tirer non plus les conséquences sur la prolongation de l’hébergement et des conditions matérielles d’accueil.
Pour reprendre l’ensemble de ces dispositions, la direction générale des étrangers en France (DGEF) renvoie à un « vadémécum » non encore publié, qui n’aura pas de valeur réglementaire. Bien que certaines des dispositions de la loi du 2 janvier 2002 s’appliquent toujours aux CADA, l’absence de mention dans un cahier des charges national risque, une nouvelle fois, d’affaiblir le modèle et de se réaliser au détriment de la qualité de l’accompagnement au sens du code de l’action sociale et des familles.
3. Les spécificités des HUDA
De manière générale, les précisions quant à ce que recoupe exactement l’accompagnement des demandeurs d’asile reste moins détaillé pour les HUDA (sauf concernant l’hébergement des demandeurs d’asile placés sous procédure DUBLIN)
Bien que les missions se rejoignent, on peut noter cependant de réelles différences entre les deux dispositifs, notamment :
- L’absence de référence à un taux d’encadrement en HUDA.
- L’absence de référence à la participation des personnes au fonctionnement de l’établissement.
- La réorientation des demandeurs d’asile victimes de traite ou femmes victimes de violences, qui est uniquement prévu en HUDA.
- L’hébergement des DA sous procédure DUBLIN et les prestations associées de contrôle des personnes.
- L’orientation de tous les réfugiés en CPH, sans précision que ce dispositif n’est prévu que pour les plus vulnérables nécessitant un accompagnement renforcé.
- L’absence de référence à l’accompagnement dans les démarches d’aide juridictionnelle.
- La référence à la possibilité de faire une demande d’aide au retour volontaire mais sans en tirer les conséquences sur la prolongation de maintien dans l’HUDA pour les déboutés.
4. Points de vigilance
a. Hébergement des demandeurs d’asile placés sous procédure DUBLIN pensé comme un lieu de contrôle pour les demandeurs d’asile en contradiction avec les missions du travail social
Bien que le cahier des charges précise les missions d’accompagnement des personnes dans leurs démarches administratives et juridiques ainsi que leur accompagnement sanitaire et social, les HUDA sont spécialisés pour l’hébergement du public Dublin.
Dans ce cadre, les missions spécifiques sont assignées aux HUDA qui relèvent plus de missions d’exécution de pouvoir de police que de missions de travail social.
A côté des rôles nécessaires d’information sur la procédure, il est prévu notamment que les HUDA :
- « Délivrent tout courriers ou document relatifs à la procédure Dublin, notamment des convocations et bons de transport ».
- « Permettent l’intervention des forces de l’ordre au sein des parties communes ».
Par ailleurs, il est également prévu que les gestionnaires doivent en quelque sorte « promouvoir » la procédure Dublin en rappelant la nécessité de coopérer pour les personnes, notamment dans le cadre du respect de l’assignation à résidence et d’assurer le point de contact avec la préfecture pour l’organisation du transfert.
Ces missions entrent en contradiction avec les missions de travail social telles que définies par la loi. Le travail social, tel que défini par l’article D142-1-1 CASF a pour objectif « l'accès des personnes à l'ensemble des droits fondamentaux, à faciliter leur inclusion sociale et à exercer une pleine citoyenneté […]Il s'appuie sur des principes éthiques et déontologiques, […]et les savoirs issus de l'expérience des personnes bénéficiant d'un accompagnement social, celles-ci étant associées à la construction des réponses à leurs besoins ». Ainsi, c’est dans le strict respect de ces principes que les gestionnaires d’hébergement doivent pouvoir accompagner les personnes, sans confusion des rôles de police et d’intervention sociale. Les associations doivent pouvoir accueillir les demandeurs d’asile placés sous procédure Dublin mais ne peuvent jouer un rôle actif dans l’organisation du transfert de la personne, tout spécifiquement lorsque les personnes ne souhaitent pas repartir vers le pays responsable de la demande d’asile.
La FAS regrette que ce cahier des charges apporte encore une nouvelle confusion des rôles des associations et des services de l’Etat dans le contrôle des demandeurs d’asile placés sous procédure DUBLIN. Ceci est d’autant plus préjudiciable pour les demandeurs d’asile particulièrement vulnérables, victimes de traites des êtres humain par exemple, pour qui le dispositif n’est pas adapté pour garantir leur protection (notamment sur les procédures de sorties et les mesures de contrôle dans le cadre de la procédure DUBLIN...).
Pour rappel, concernant l’intervention des forces de l’ordre, le gestionnaire reste libre d’autoriser ou non l’administration à intervenir dans les parties communes de l’HUDA. Ce document ne peut venir justifier des pratiques qui ne s’appuient sur aucun fondement légal.
Par ailleurs, l’accès aux parties privatives peut être autorisé dans le cadre stricte des visites domiciliaires lorsque l’étranger n’aura pas respecté sa mesure d’assignation à résidence. Dans ce cadre, « l'autorité administrative peut demander au juge des libertés et de la détention de l'autoriser à requérir les services de police ou les unités de gendarmerie pour qu'ils visitent le domicile de l'étranger afin de s'assurer de sa présence et de le reconduire à la frontière ou, si le départ n'est pas possible immédiatement, de lui notifier une décision de placement en rétention » (Article L561-2 II CESEDA) . Cette procédure se réalise avec l’autorisation du juge des libertés et de la détention, sans nécessairement exiger l’accord de la personne.
b. Une remise en cause du travail social en CADA
De manière générale, le modèle CADA se réduit peu à peu pour s’éloigner de ce qui le définit comme établissement social relevant du code de l’action sociale et des familles (CASF).
En effet, non seulement un grand nombre de dispositions du CASF sont éludées du cahier des charges (rappel du principe de l’autorisation, des appels à projets, des outils de programmation…) mais la référence aux droits des personnes et l’ensemble des outils de la loi du 2 janvier 2002, tels qu’ils étaient rappelé dans le précédents cahier des charges, disparait du document cadre.
Ainsi, plus aucune référence à un contrat de séjour, règlement de fonctionnement ainsi qu’à l’ensemble des obligations en termes de participation des personnes et de la garantie de leur droit au sein d’un établissement social n’est rappelé (livret d’accueil, projet d’établissement, charte des droits et libertés de la personne accueillie…).
De la même manière, la professionnalisation des intervenants sociaux disparait du cahier des charges des CADA et n’est pas précisé dans celui de l’HUDA. Cette absence est problématique car elle assurait que les missions de travail social étaient garanties au sein des CADA, assurées par des professionnels diplômés du travail social. L’évolution d’un cahier des charges vers des missions d’accompagnement juridique et de droit au séjour, qui restent essentielles, risque ainsi de transformer progressivement les missions de ce dispositif.
On regrette également une confusion entre les missions d’accompagnement et d’information au sein des deux dispositifs.
En termes de secret professionnel, le cahier des charges prévoit notamment que « Le gestionnaire du centre d'accueil pour demandeurs d'asile informe le préfet en cas de risque d'atteinte à l'ordre public et le procureur en cas de toute infraction pénale ». Cette disposition porte une nouvelle confusion dans le rôle attribué aux travailleurs sociaux qui n’est pas d’assurer des missions de police.
Les CADA sont des établissements sociaux relevant du code de l’action sociale et des familles CASF, l’ensemble des droits des personnes et des obligations tirées de ce statut d’ESMS doit être garanti par le gestionnaire. Si ces références ne sont plus rappelées dans le cahier des charges, l’établissement est tenu de répondre à ces obligations vis-à-vis des personnes accueillies et également des autorités dans le cadre d’un contrôle et des règles relatives aux évaluations
c. L’absence de compensations financières pour les nouvelles prestations attendues
L’évolution de l’accompagnement en CADA et en HUDA est aujourd’hui réalisée à coût constant. Ainsi, le coût cible journalier en CADA est toujours fixé en 2019 à 19.50€ et celui de l’HUDA à un coût national cible de 16,25€ (sauf idf et création).
La FAS se félicite que les prestations d’accompagnement en hébergement d’urgence fassent enfin l’objet d’une clarification, mais regrette cependant que les coûts associés ne soient pas réellement pris en compte. Ainsi, si le fond de secours doit permettre d’assurer l’alimentation des personnes qui n’ont pas de ressources (en attente de l’ouverture ADA par exemple) et que les transports pour les entretiens OFPRA ou CNDA ou en préfecture sont désormais pris en charge par les gestionnaires de CADA, ces postes de dépenses doivent être prises en compte dans le financement global de l’établissement et sont difficilement compatibles avec les coûts affichés.
De plus, s’il est attendu des HUDA les qualités d’accompagnement des CADA, les coûts devraient se rapprocher pour s’aligner sur les coûts CADA.
d. Une clarification partielle des missions d’urgence : exclusion souhaité par le ministère des CAES et des PRAHDA
La loi du 10 septembre 2018 poursuit l’objectif d’homogénéiser les prestations au sein des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile. La loi réglemente ces lieux comme « 2° Toute structure bénéficiant de financements du ministère chargé de l'asile pour l'accueil de demandeurs d'asile et soumise à déclaration, au sens de l'article L. 322-1du même code » (article L744-3 CESEDA).
Le cahier des charges sur l’hébergement d’urgence des demandeurs d’asile s’applique donc aux CAO, AT-SA, HUDA existants, ainsi qu’aux HUDA issus de la transformation de CHUM en idf.
Ils devraient également s’appliquer ainsi à toutes les structures bénéficiant du financement du ministère chargé de l’asile, donc aux PRAHDA et aux CAES, malgré le souhait du ministère de les exclure de ces cahiers des charges.
e. L’absence de clarification sur les modalités de sorties des dispositifs
Avec l’accélération des délais et l’évolution des notifications des décisions qui peuvent désormais se réaliser « par tous moyens », la loi du 10 septembre 2018 a complexifié les règles sur la sortie des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile. Ces règles sont d’autant plus complexes à comprendre avec l’introduction dans la loi de la fin du droit au maintien sur le territoire français des demandeurs d’asile placés en procédure prioritaire (pays d’origine surs notamment). En effet ces derniers peuvent faire l’objet d’une OQTF et d’une expulsion avant même leur audience devant la CNDA. C’est à l’occasion de la contestation de cette OQTF devant le tribunal administratif que le caractère suspensif (et les conditions matérielles d’accueil, dont l’hébergement) pourront être rétablies. La FAS regrette qu’aucune règle claire ne soit établie pour les gestionnaires quant au point de départ des fins des conditions matérielles d’accueil, notamment sur la manière de prendre en compte la fin du recours suspensif pour les demandeurs d’asile placés en procédure prioritaires. Cette absence de clarification pèsera donc sur l’interprétation de chaque gestionnaire ou des DT OFII et aboutira à un traitement différencié entre demandeurs d’asile. La FASregrette d’autant plus cette situation que des conséquences financières s’imposeront aux gestionnaires en cas de présences indues.
f. Une procédure contentieuse d’expulsion du CADA et de l’HUDA ambiguë.
Concernant les nouvelles modalités contentieuses sur la sortie de l’hébergement, la loi du 10 septembre 2018 prévoit que la procédure de référé « mesure utile » concernant l’expulsion des déboutés des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile peut être réalisée par le préfet ou le gestionnaire du lieu d’hébergement.
La FAS regrette que le cahier des charges omette de rappeler que cette procédure ne s’applique qu’aux déboutés de la demande d’asile et non aux BPI comme pourrait être interprété le cahier des charges. De plus, il reste flou sur la procédure à suivre et les situations ou ni le gestionnaire, faute de temps ou de compétence pour engager ces contentieux, ni le préfet n’engageront ces procédures, laissant la encore le gestionnaire assumer des potentiels risques de minorations budgétaires.
Par ailleurs, de façon globale et face à l’augmentation du nombre de personnes bénéficiaires d’une protection internationale au sein du dispositif national d’accueil, l’accompagnement de 3 mois renouvelable une fois après l’obtention du statut n’est pas suffisant pour réaliser une sortie vers le droit commun avec l’ensemble des droits ouverts. Les pressions qui existent aujourd’hui sur la sortie de ces publics du DNA ne peuvent conduire à une remise à la rue sèche des réfugiés, sans solution de sortie.
Concernant les déboutés, la FAS regrette que l’accompagnement à la sortie et leur orientations vers les prestations de droits commun ou d’accès aux droits, notamment l’hébergement d’urgence, ne vise que les publics vulnérables. En effet, restreindre l’information sur les droits à un type de public vulnérable est non seulement contraire au principe d’accueil inconditionnel nécessitant une appréciation individuelle de chaque situation mais méconnait également les missions du travail social qui « vise à permettre l'accès des personnes à l'ensemble des droits fondamentaux, à faciliter leur inclusion sociale et à exercer une pleine citoyenneté».
Certaines régions ont adopté une position de principe sur la compétence de l’Etat pour engager ses procédures au lieu et place des gestionnaires. Ces « bonnes pratiques » sont à valoriser pour éviter encore une fois une confusion des rôles entre les gestionnaires et l’administration et ce, afin que les gestionnaires se mobilisent sur des missions d’accompagnement qui relèvent plus de leur compétences et de leur savoir-faire.
Cliquez ici pour télécharger l’arrêté du 15 février 2019 relatif au cahier des charges des CADA
Cliquez ici pour télécharger l’arrêté du 15 février 2019 relatif au cahier des charges des HUDA